POLOGNE • Révélations sur la pédophilie : touche pas à mon Eglise !

http://www.courrierinternational.com/article/2013/02/01/revelations-sur-la-pedophilie-touche-pas-a-mon-eglise
 
Il a fallu un journaliste néerlandais pour écrire le premier livre sur les actes de pédophilie commis par des prêtres en Pologne. Malheureusement, déplore Gazeta Wyborcza, on évite trop souvent le sujet, par crainte de se faire traiter d'"ennemi de l'Eglise".
Gazeta Wyborcza |Katarzyna Wisniewska |1 février 2013
Ce livre ne va pas plaire à l'Eglise. Le journaliste néerlandais et correspondant à Varsovie, Ekke Overbeek, parle de sa "face sombre" en paraphrasant les propos les plus connus et sans cesse répétés de Jean-Paul II : "N'ayez pas peur !" Provoquant, Overbeek nous dit le contraire, parce que – comme il l'affirme – l'Eglise polonaise n'a pas réglé ses comptes avec les prêtres pédophiles, se rangeant du côté des coupables plutôt que des victimes.
Comparée à l'Eglise polonaise, L'Eglise catholique néerlandaise est toute petite. Pourtant, elle a réagi immédiatement après l'éclatement des scandales de pédophilie. Les évêques néerlandais ont même ouvert les archives dans les diocèses.
 
Cela serait impensable en Pologne. Selon la majorité de prêtres, la pédophilie est marginale et ne concerne qu'un petit groupe, et si ces histoires s'ébruitent, c'est une preuve de la perfidie des "ennemis" de l'Eglise. Overbeek souligne que cette attitude est acceptée par l'opinion publique. La Pologne n'était-elle pas un pays communiste où finalement les prêtres n'avaient pas beaucoup d'occasions de côtoyer les jeunes ? Ce n'est pas comme en Irlande où les écoles et les internats catholiques sont nombreux...
 
Toutefois, du temps du communisme, personne n'attaquait l'autorité des prêtres en Pologne [sauf l'Etat...]. Aussi, ces derniers vivaient un peu mieux que le reste de la société, ils disposaient des "petits extras" dans la grisaille généralisée, comme des sucreries envoyées de l'étranger [dans le cadre de l'aide internationale, distribuée dans les paroisses]. Toutes les occasions étaient bonnes pour les pédophiles. Overbeek a retrouvé plusieurs dizaines de victimes. Leurs histoires choquent.
 
Deux mots clés : la peur et le secret
 
Selon l'auteur, les médias polonais font dans le "sensationnel" et partent à la chasse aux prêtres pédophiles une fois que l'affaire est déjà entre les mains du procureur. C'est injuste vis-à-vis de Gazeta Wyborcza, qui a traité le sujet de la pédophilie dans l'Eglise polonaise à maintes reprises, et sur le fond.
 
Malgré cela, il s'agit d'une lecture importante. Overbeek montre les obstacles qui empêchent de trouver la solution au problème de la pédophilie dans l'Eglise. Dans son livre, il y a deux mots clés. Le premier, c'est la peur. Les victimes se terrent dans le silence, par crainte de la réaction de leur entourage, et de l'Eglise elle-même. "Comment est-il possible qu'une institution qui se réfère à la Bible et qui proclame l'amour du prochain puisse se permettre de susciter la peur et la déception ?" S'agit-il d'une question naïve ? Plutôt très vraie et elle fait mal. En Pologne, l'interdit selon lequel on ne dit pas de mal des prêtres est bien ancré. C'est pourquoi, une partie des interlocuteurs d'Overbeek se sont retirés [du livre]. Certains ont eu peur de se faire excommunier.
 
Le deuxième mot clé est le secret. Une attente interminable à ce que la curie réponde. L'administration ecclésiastique qui demande de rester discret. Des procès secrets – si toutefois ils ont lieu – selon le droit canon. "L'évêque a dit que le silence était important", confie une victime.
 
Gazeta Wyborcza |Katarzyna Wisniewska |1 février 2013





albert on mercredi 01 mai 2013 - 20:04:17